Huitième semaine du procès (copie)
Newsletter résumant la deuxième semaine du procès (12/12/2022)

Bienvenue dans la neuvième édition de la newsletter de V-Europe. La newsletter de cette semaine est rédigée par Me Adrien Masset, avocat de nombreuses parties civiles pendant ce procès en tant que membre de l’équipe de défense de V-Europe. Cette semaine a permis de terminer la présentation des différents accusés et de commencer à poser les questions aux enquêteurs. La newsletter de cette semaine est séparée par thème abordé.

Vous souhaitez recevoir cette newsletter par mail ? N’hésitez pas à envoyer un mail à Florian Jehin : florian.jehin@v-europe.org.

Sommaire

  • Présentation de l'accusé Ossama KRAYEM
  • Présentation de l'accusé Hervé BAYINGANA MUHIRWA
  • Présentation de l'accusé Ibrahim FARISI
  • Présentation de l'accusé Sofien AYARI
  • Présentation de l'accusé Salah ABDESLAM
  • Présentation de l'accusé Oussama ATAR
  • Questions aux témoins, enquêteurs et juges d'instruction
  • La semaine à venir

Présentation de l'accusé Ossama KRAYEM 

La journée du lundi 6 février a été tout entière consacrée à la présentation de l’accusé Ossama KRAYEM (conseils : Me Gisèle STUYCK), dit Abou Omar.

Originaire de Suède où il fut même cité en exemple d’intégration par le sport (club de football de Malmö), il s’est converti plus tard et est parti en Syrie où il est resté 1,5 an.

Il est présent à Châtelet le 03/10/15 en présence de BAKKALI et est lié aux attentats de Paris. KRAYEM en fut condamné à 30 ans de réclusion. KRAYEM vit dans la clandestinité, toujours en présence d’AYARI, dans des logements à Charleroi, à Schaerbeek (rue Henri Berger) jusqu’aux attentats de Paris. Sa présence est relevée à partir du 03/11/15 dans les différentes planques de Bruxelles (Exposition, Dries, Roos, Casernes, Tivoli).

Le 13/11/15, jour des attentats de Paris, il fait un aller-retour à l’aéroport de Schiphol pour revenir rue Henri Berger puis les planques subséquentes. Le 29/02/16, il quitte la rue du Dries avec Khalid EL BAKRAOUI, Ibrahim EL BAKRAOUI, ABRINI, LAACHRAOUI, vers la rue Max Roos ; la présence d’armes est relevée. Les premiers achats de logistique débutent le 03/03/16 chez Blokker. Il participe à l’achat de bidons. Le 16/03/16, il arrive à la rue des Casernes et les photos figurent un pansement sur sa joue qu’il nie lié au petit incendie rue Max Roos comme le dit, pourtant, ABRINI.

Il explique qu’il y a une précipitation dans l’équipe en raison de la découverte de la rue du Dries et de la publication des photos des frères EL BAKRAOUI : sans cette précipitation, il y aurait eu bien plus d’attentats et bien mieux préparés.

Après l’attentat Maelbeek, il retourne rue Tivoli chez BAYINGANA où il retrouve ABRINI. Il est localisé dans la mesure où le 03/04/16, une communication avec l’identifiant oz.oz. est identifiée (et attribuée à BAYINGANA), une observation est mise en place sur l’appartement rue Tivoli de BAYINGANA ; le 04/04/16, la même adresse mail contacte le frère qui habite la Suède pour le déterminer à venir le chercher. Il est arrêté le 08/04/16.

Lors de la reconstitution, il dit être sorti avec les sacs dont les fils sortaient, sans qu’ils dégagent une odeur. Il explique comment il a vidé la poudre du sac après l’attentat Maelbeek. Il précise que Khalid EL BAKRAOUI lui a appris chemin faisant vers le métro que les explosions avaient déjà eu lieu à Zaventem, sans que cela soit coordonné. Il n’a pas fait le lien quand il a eu connaissance de la revendication par l’EI. Il dit avoir annoncé à Khalid EL BAKRAOUI son intention d’arrêter le projet lorsqu’ils se sont trouvés entre l’entrée du métro et les quais.

Il dit n’avoir pas rédigé de testament.

L’enquête de moralité n’a pas pu être développée dans la mesure où sa famille est en Suède.

De manière glaçante, les enquêteurs ont mentionné que, dans le cadre de cette enquête, KRAYEM déclare :

"Depuis que je suis allé en Syrie et que je suis en prison, j'ai perdu une grande part de mon humanité. Il y a un gros problème car si je tue quelqu'un, un père ou une mère qui a des enfants, je n'éprouverais aucun sentiment. Toute ma vie est neutre, comme cette entrevue avec vous ou comme la visite de mes parents. Quand j'assiste au cours de français, je ne sais pas ce que je peux dire ou non à mes collègues de cours. Si je vais au tribunal et qu'on me dit que j'écope de 20 ou 50 ans, pour moi c'est neutre. Tous les sentiments ont disparu."

Présentation de l'accusé Hervé BAYINGANA MUHIRWA

La journée du mardi 7 février a été en partie consacrée à la présentation de l’accusé
Hervé BAYINGANA MUHIRWA (conseil : Me Vincent LURQUIN), dit Abou Amin, ce qu’il a toujours contesté.

Il est originaire du Rwanda, venu en Belgique, naturalisé belge, 30 ans lors des faits, célibataire sans enfant, converti (Abdelkarim) et a un bac de promotion sociale.

L’enquête s’est intéressée à lui en raison d’une note de la Sûreté de l’Etat à propos de la connexion oz.oz. déjà mentionnée.

La voiture de BAYINGANA a été saisie lors de l’arrestation du 08/04/16 à 11h30 en présence de KRAYEM, suivie d’une perquisition rue Tivoli à Laeken, de ses auditions et des suites d’enquête avec les supports informatiques et téléphoniques.

Il travaillait depuis quelques mois comme veilleur de nuit dans un centre d’accueil de demandeurs d’asile de la Croix Rouge à Jette : il était en repos de travail, programmé, dès le 21/03/16 à 7h19 jusqu’au 24/03/16 quand il a repris son service à 21h14.

Il forme un véritable duo avec Bilal EL MAKHOUKHI (leur 2 kunya sont mentionnées sur leurs numéro de téléphone sur un document retrouvé rue Max Roos) qui a un cercle d’amis où gravitent certains proches de Najim LAACHRAOUI.

Un rôle d’intendant lui est prêté ; comme logisticien, il a acheté des tablettes, des vêtements, a véhiculé des membres de la cellule, spécialement KRAYEM et ABRINI qu’il a hébergés avant et après les attentats de Bruxelles.

Il est question dans une écoute téléphonique d’un sac à dos à amener par un ami pour KRAYEM qui n’était venu qu’avec des sacs en plastique ; le sac à dos amené par l’ami était trop petit.

Il n’a pas de casier judiciaire ; il a été noté dans des rapports administratifs en 2014, notamment avec Bilal EL MAKHOUKHI ; il avait travaillé jeune dans un magasin de vêtements Jennifer où plusieurs noms connus sont passés aussi.

La kunya Amin, déniée par lui, lui est attribuée sur la base de plusieurs éléments : 

  • les déclarations de KRAYEM et d’ABRINI
  • le document retrouvé rue Max Roos  
  • des éléments des audios retrouvées dans le PC Max Roos qui le désignent dans les phrases tenues entre le 13 et le 15/03/16 « on a un frère de plus dans la logistique » et le 21/03 « ce frère a déjà travaillé », ce qui ferait référence à l’accueil à l’appartement de BAYINGANA rue Tivoli pour récupérer KRAYEM et ABDESLAM, amenés par Bilal EL MAKHOUKHI, après la fusillade du 15/03/16 de la rue du Dries
  • l’analyse de l’ordinateur trouvé chez lui rue Tivoli et dans lequel il y a eu des recherches sur « Amin » qu’il n’explique pas

Il est relevé que BAYINGANA a évolué dans ses déclarations et que des contradictions demeurent. Il a dû concéder connaître Najim LAACHRAOUI.

Il est resté constant pour dire n’avoir pas fait allégeance à l’EI, alors que des anachids ont été retrouvées dans son GSM, soutenant qu’elles furent téléchargées sur des conseils d’amis ; il ne comprend pas l’arabe.

L’enquête de moralité le décrit comme collègue de travail apprécié, même envers les femmes, sans pratique de l’islam, opposé à la violence ; il s’interdit de rencontrer d’autres détenus, pour éviter l’accusation de prosélytisme.

L’expertise psychologique le décrit comme lisse et dans un rôle de maîtrise sur lui-même.

Présentation de l'accusé Ibrahim FARISI

La journée du mardi 7 février s’est poursuivie par la présentation de l’accusé Ibrahim FARISI (conseil désigné d’office par la Cour : Me Xavier CARETTE), qui comparaît libre.

Il est poursuivi pour une seule accusation, à savoir participation aux activités d’un groupe terroriste.Son image apparaît dès le 23/03/16 à la rue des Casernes.Son casier judiciaire ne comporte que de nombreuses condamnations de roulage. Il est taximan.

Il ne connaît aucun autre protagoniste que son frère Ismaïl ; il partage avec son frère le surnom « fumier »

Il dit avoir dû emménager chez Smaïl pour fuir le brouhaha familial et dormir le jour après ses nuits de taximan : il y a dormi du 1er au 04/10/15, sans être revu à l’adresse avant le 23/03/16 : son frère lui aurait dit de déguerpir, ce qu’il pensait pour pouvoir tranquillement ramener une copine (ce fut en réalité pour l’installation d’Ibrahim EL BAKRAOUI qui arrive le 3 ou le 4/10/15 ; ils ne se sont cependant pas rencontrés, selon les images vidéos.

Il a aidé son frère à déménager la rue des Casernes, à partir du 23/03/16, et ils ont tout jeté par dépôt chez les Petits Riens (section musulmane) : depuis 11h, on l’y voit pendant 10 min, en réalité 4 min, entre 18h28 et 18h32 avec un gant en latex dont il soutient qu’il recouvrait un mouchoir sur sa main blessée à sang pour ne pas tacher la porte de l’ascenseur. Selon Me Carette, Smaïl n’a pas été interrogé sur ledit gant parce que Smaïl n’était pas présent dans cette tranche horaire.

Le destinataire de l’audio « fumier » ne serait pas lui-même.

Présentation de l'accusé Sofien AYARI

La journée du mardi 7 février s’est encore continuée avec la présentation de l’accusé Sofien AYARI (conseil : Me Isa GULTASLAR), qui, comme ABDESLAM, était détenu lors des attentats du 22/03/16 pour avoir été arrêté après sa fuite de la rue du Dries.

Sa culpabilité n’a été recherchée que plus tard, sur réquisitions complémentaires du Parquet fédéral du 25/05/18, ce qui en rend le dossier moins fourni.

Il a toujours opposé son droit au silence pour ne rien répondre, même pour l’enquête de moralité où seules ses déclarations dans les dossiers de Paris et de la rue du Dries ont été puisées. Il avait été condamné à une peine de 20 ans d’emprisonnement dans l’affaire de la rue du Dries.

Il a été condamné par la cour d’assises de Paris à 30 ans de réclusion, à l’instar de KRAYEM, pour avoir fait le voyage à Schiphol la journée du 13/11/16 (l’arrêt de la cour d’assises de Paris, page 51, retient qu’ils ont fait ce voyage parce qu’ils en avaient été missionnés) ; il a vécu dans les différentes planques et a dû connaître les différents projets d’attentats.

Ce tunisien, célibataire, sans enfant, dont la kunya est Abou Hamza (et parfois Abou Hamed selon KRAYEM) a vécu en Syrie en juin et juillet 2015 (il y a été blessé à la mâchoire) où il a fait partie de la même brigade que KRAYEM et est revenu en Europe où ABDESLAM est allé le chercher, lui et KRAYEM, à Ulm (Allemagne) pour les ramener à Bruxelles rue Henri Berger à Schaerbeek (où furent préparées les bombes pour Paris). Il passe ensuite dans une planque à Charleroi.

Tous les protagonistes des dossiers de Paris et de Bruxelles sont passés par ces mêmes planques (rue Henri Berger à Schaerbeek, avenue de l’Exposition à Jette, rue du Dries à Bruxelles où le bail commence le 02/12/15, début de la période infractionnelle reprochée pour Bruxelles), puis pour certains, après des tensions, rue Max Roos)

Il est arrêté le 18/03/16 quelques jours après la fusillade de la rue du Dries.

ABRINI dira que ABDESLAM et tous ceux qui étaient dans les planques étaient au courant des projets pour y participer : si vous êtes dans les planques, c’est que vous étiez prévus pour les attentats ; il n’y a pas eu de fabrication de TATP pour Bruxelles avant la rue Max Roos où a vraiment débuté la préparation des attentats de Bruxelles. ABRINI et KRAYEM disent qu’AYARI et ABDESLAM, qui ne sont pas venus rue Max Roos, n’ont rien à voir avec les attentats de Bruxelles.

Aucun testament d’AYARI n’a été retrouvé.

Présentation de l'accusé Salah ABDESLAM

La journée du mardi 7 février s’est encore continuée avec la présentation de l’accusé Salah ABDESLAM (conseils : Me Delphine PACI et Me Michel BOUCHAT), qui, comme AYARI, était détenu lors des attentats du 22/03/16 pour avoir été arrêté après sa fuite de la rue du Dries.

Il a été condamné à la réclusion à perpétuité incompressible à Paris. Il est le seul survivant des attentats de Paris. Il avait déposé 3 kamikazes au Stade de France avant de partir et ensuite de prendre la fuite.

Sa kunya est Abou Abderrahman ; une lettre non datée a été retrouvée dans le PC Max Roos et serait possiblement destinée à l’émir Oussama ATAR : ABDESLAM s’y plaint que sa ceinture n’a pas fonctionné à Paris parce qu’elle était défectueuse, il est revenu à Bruxelles pour finir le travail et demande à ce qu’on veille à ce qu’il dispose d’un meilleur équipement.

Il est question, selon la Sûreté de l’Etat, de son testament non signé et de l’enveloppe qui aurait été perdue lors de la fuite de la rue du Dries.

Il a toujours fait usage de son droit au silence à propos des attentats de Bruxelles, sous la seule précision répétée qu’il n’a rien à voir avec ces attentats puisqu’il était en prison. Pour les attentats de Paris, il n’y a qu’une seule audition dans laquelle il s’exprime.

Il a une fiancée depuis 2010. Ses fiançailles ont été célébrées le 15/10/15 en présence d’ABRINI.

ABDESLAM a fait fonction de chauffeur puisqu’il a effectué une douzaine de voyages pour aller rechercher en Hongrie, Allemagne, … des personnes revenant de Syrie, dont certains seront de l’expédition terroriste à Paris. Il est revenu de Paris le 14/11/15 en Belgique et est passé par les planques rue Berger, av. Exposition et rue Dries.

Il a été ensuite donné lecture et explication des 3 lettres écrites par ABDESLAM à destination de sa mère, de sa sœur et de sa fiancée Yasmina à qui il avait promis le mariage qu’il a dû décliner car Allah en avait décidé autrement.

Il a été inculpé plus tard par la juge d’instruction, et de manière partielle, pour les attentats de Bruxelles.

La journée du mardi 7 février a alors été interrompue pendant plus de 1h30 pour une rupture de câbles électriques dans le bâtiment Justitia, avant de reprendre avec quelques questions posées aux 4 témoins pompiers et membres des services de secours, les premiers intervenants : le procureur fédéral les a remerciés de leur intervention. Une avocate de L4B a posé quelques questions sur le périmètre de sécurité et a demandé des précisions sans intérêt pour la manifestation de la vérité.

Présentation de l'accusé Oussama ATAR

La journée du mardi 7 février s’est terminée avec le début de la présentation de l’accusé Oussama ATAR (supposé décédé et partant sans conseil), kunya Abou Ahmed (le chimiste) voire Abu Yaser al-Baljeki ou al-Iraqi.

ATAR, qui est le cousin des frères EL BAKRAOUI qu’il a beaucoup visités en prison en 2012-2013 durant leur incarcération (et radicalisation), est parti en Irak en 2004 où il est arrêté par les forces de la coalition en 2005 et condamné en 2007 à une peine à perpétuité réduite ensuite à 10 ans d’emprisonnement ; il séjourne notamment dans la prison américaine d’Abou Ghraib près de Bagdad; sur acceptation de délivrance d’un passeport par les Affaires étrangères belges comme fruit d'une intense campagne orchestrée par sa famille et certaines personnalités publiques, - qui mettent en avant ses problèmes médicaux -, il a pu revenir en Belgique en 2012 où il fut présenté, à son retour, à une juge d’instruction qui l’a inculpé mais ne l’a pas placé sous mandat d’arrêt ; il est expliqué à l’audience que la juge d’instruction a tenu compte qu’il avait déjà été détenu pendant 7 ans (il y côtoie les fondateurs de l’EI) et que les faits qui lui étaient reprochés pourraient être en conflit avec la règle non bis in idem (on ne peut pas poursuivre quelqu’un deux fois pour les mêmes faits). A son retour en Belgique, il a renoncé à être vu par un médecin et a déclaré ne prendre aucun médicament et ne pas être malade ; dans l’enquête de moralité, ses sœurs parlent de problèmes de santé. Il est reparti fin 2013 en Syrie via la Turquie après un petit séjour en Tunisie où il est arrêté administrativement et expulsé, pour un signalement non effacé.

Pour beaucoup, ATAR est une « légende » ; il est l’émir et l’organisateur des attentats en Europe.

Le mercredi 8 février s’est poursuivie cette présentation où la place d’ATAR a été située dans la structure de l’EI : au sommet de l’EI, le calife autoproclamé, Abou Bakr AL-BAGHDADI, est entouré d’un comité restreint où se trouve aussi de manière prépondérante Abou Mohammed AL ADNANI ; au sein de l’EI, il y a des liens croisés entre, d’une part, le Bureau ou la Cellule des opérations extérieures (COPEX), dirigée par AL ADNANI, et, d’autre part, la Brigade spéciale qui intervient comme unité d’élite (la Liwa As Saddiq), créée aussi par AL ADNANI.

La COPEX pouvait aussi bien organiser des attentats en Europe que dans le monde arabe, comme en Tunisie. Les membres de la Liwa As Saddiq étaient des combattants d’élite ayant fait leurs preuves après une formation spécifique en lien avec la fabrication d’explosifs, la gestion des otages et le recours à des moyens technologiques de communication cryptée. La Liwa As Saddiq aurait été dirigée par ATAR ; en auraient fait partie KRAYEM et LAACHRAOUI.

Au vu des éléments présentés dans l’enquête, Abou Mohamed AL ADNANI, «porte-parole» de I'EI et « directeur des opérations extérieures », apparaît comme Ie « patron », Ie responsable final des attentats de Bruxelles et de Paris, sous I’autorité duquel Oussama ATAR a créé ex-nihilo les «cellules» de Bruxelles et de Paris.

Le lien entre les personnes de Molenbeek et de Laeken aurait été fait, en réalité, par ATAR en Syrie, selon ce que déclare KRAYEM.

ATAR serait décédé en novembre ou décembre 2017 en Syrie ou en Irak à l’occasion d’attaques par drones.

Au sein de l’EI, il y avait une obligation de porter la barbe et une interdiction de porter des vêtements occidentaux ou avec des marques commerciales ; ils ne portaient ni costume ni jeans avec marque. Un membre de l’EI se distinguait de la population civile en ce qu’il était toujours armé, porteur d’un gilet « police religieuse » s’il en faisait partie, ou en ce qu’il avait une fonction propagandiste par des prêches en faveur d’une vie plus éthique.

La famille d’ATAR a déclaré, lors de l’enquête de moralité, qu’il imposait le placement d’un paravent devant la télévision en telle sorte qu’on ne pouvait pas voir la tête dénudée de la présentatrice.

Questions aux témoins, enquêteurs et juges d'instruction

La journée du jeudi 9 février a été consacrée, comme le seront les journées de la semaine du 13 au 16 février (avant la semaine de repos), aux questions et réponses du parquet fédéral, des parties civiles et de la défense des accusés à destination des témoins de la phase 1, à savoir les premiers intervenants, de la phase 2, à savoir les témoins intervenus dans les premières investigations à Zaventem et Maelbeek, et de la phase 3, à savoir ceux intervenus dans l’enquête.

Il a ainsi été précisé que des garrots furent placés par des militaires qui utilisèrent leur ceinture, que le TATP était d’une fabrication assez semblable pour les deux sites, que les boulons et vis étaient, sur les deux sites, semblables.

A plusieurs questions de la victime Philippe Vandenberghe, victime à Zaventem, qui a pu les poser directement en l’absence de son conseil personnel, la Présidente a précisé bien comprendre le sens des questions qu’il posait, dirigées vers la mise en évidence d’éventuelles erreurs ou manquements source d’éventuelle responsabilité professionnelle des intervenants, pour aussitôt préciser qu’elle ne poserait pas ces questions car, pour compréhensibles qu’elles soient, elles échappent à la mission judiciaire de la cour d’assises qui est saisie, en tout et pour tout, de la question de savoir si chacun des 10 accusés est coupable ou innocent des faits qui leur sont reprochés, et de rien d’autre.

Dans la mesure où toutes les questions passent par le filtre de la Présidente, à l’inverse des règles du procès à Paris, toute question sans lien direct avec la responsabilité des accusés sera rejetée et ne sera donc pas posée.

Les présentations assurées par les enquêteurs comptent plus de 4500 slides pour faire la synthèse d’une instruction forte de 300 cartons : ces slides (format powerpoint) nous ont été communiqués ce 12 février et nous en disposons.

La journée du jeudi 9 février s’est terminée par les questions posées par différentes parties : on retiendra spécialement :

  • Des rouleaux de pâtisseries (pour accélérer le séchage) étaient présents rue du Dries et rue Max Roos. Il n’y avait de traces de TATP que sur les rouleaux de la rue Max Roos
  • Il faut trois à quatre personnes pour fabriquer 130 kg de TATP
  • KRAYEM précise qu’il n’a pas mis les batteries pour se rendre au métro. S’il n’a pas mis les deux piles, quid s’il dépose ce sac dans la rame de métro et le laisse dans le métro. Si Khalid EL BAKRAOUI se fait exploser et que l’autre sac est à proximité, il y a un risque de « détonation par sympathie ». Le risque d’explosion existe même sans détonateur
  • L’aéroport est une « soft target » comme un stade de foot et une gare car ce sont des lieux indispensables de passage du public. Pour le plan d’action 2016, il y avait une organisation de la planification d’urgence qui faisait suite à la catastrophe de Ghislenghien en 2004. L’inquiétude des attaques à la bombe existait depuis 2001, époque des assassins du commandant Massoud qui avaient leur base arrière à Bruxelles depuis lors : cette réalité a été intégrée dans les éléments de risque du côté du service des pompiers de Bruxelles. L’attaque du musée juif en mai 2014 avait aussi préparé à cette éventualité. Les formations ont été adaptées : prioriser nos actions, d’abord stopper les hémorragies sur place et ensuite continuer la prise en charge dans un lieu d’urgence : la médecine de guerre a été apprise et les enseignements ont été tirés suite au tremblement de terre à Haïti en 2010
  • Le sac d’ABRINI a été abandonné à Zaventem près du Délifrance en direction du check in : il est abandonné sur une place où des gens pouvaient trébucher dessus, avec une charge similaire aux autres. Il n’est pas facile de neutraliser une bombe sans en connaître la confection. En revanche, la manipulation de retrait des batteries qui aurait été faire par un des trois kamikazes de Zaventem est simple. Par contre, le risque d’explosion existe en cas de fausse manipulation, par exemple en touchant le bouton poussoir. Il y avait des piles dans le sac de la bombe trouvée à Zaventem. Une explosion est plus forte avec un sac à la verticale. On ne voit pas de bouton poussoir dans la main de Khalid EL BAKHRAOUI dans le métro, uniquement un fil dans la manche
  • Il y avait des militaires patrouillant à Arts-Loi dans le cadre de l’opération « vigilant guardian ». Selon le SPF Défense : « après les attentats Charlie Hebdo, une analyse de la situation de sécurité nationale a été faite. L’armée a été déployée pour aider la police à sécuriser des sites sensibles ». Réponse : c’est la police qui définit les sites sensibles et non l’armée. L’Ocam fait l’analyse de la menace, ensuite le centre de crise détermine les mesures, la haute direction de la police reçoit l’info, et on a un renforcement de la défense
  • Le schéma d’une commande à distance d’un explosif peut être très simple
  • L’audition de la « recette » (« carvette ») décrite par Najim LAACHRAOUI : « Ce qu’on a réussi à avoir, c’est de l’acide nitrique à 60%, pour le nitroglucole, peut-on en fabriquer à partir de l’acide nitrique à 60 % ? Dis-lui qu’il essaie là-bas et qu’il nous fasse une réponse. Tu sais bien on est là, on a rien à faire, on est toute la journée à l’appartement et on a le temps de tester tu vois, on verra bien » fait dire au témoin que c’est de l’ingénierie militaire, mais que si les experts du labo policier devaient en apprécier la pertinence, ils diraient que « ça ne sert à rien, tu vas avoir un excès d’acide, ça n’a pas de sens ». L’excès d’acide risque de rendre plus instables les cristaux de TATP (aussi appelé peroxyde d’acétone). Le témoin précise que le fait que LAACHRAOUI essaie démontre qu’il ne sait pas où il va aller et qu’il n’utilise pas de terme scientifique, ce qui laisse penser qu’il ne sait pas où il va et qu’il ne sait pas pourquoi ces tests donnent ces résultats
  • Sur questions de Me COURTOY, conseil de Smaïl FARISI, il est précisé que chaque petite poubelle est de 12 litres permettant maximum 15 kg par poubelle, ce qui donne une idée de quantité de TATP dans les deux sacs de Maelbeek. La distance entre Max Roos et Av. des Casernes parcourue par KRAYEM pour déplacer les bombes est de 7,5 kms, ce qui a supposé 4 trajets (un par bombe, mais seuls deux trajets avec un sac rempli), ce qui fait dire au conseil que c’est très risqué. A l’objection de cet avocat que KRAYEM eut été plus prudent de demander de l’aide à Smaïl FARISI pour, au final, ne faire qu’un seul trajet, le témoin répond qu’il est encore plus dangereux de circuler avec les deux sacs l’un à côté de l’autre car si l’un explose à côté de l’autre, la situation est encore pire (la deuxième bombe pouvant exploser par sympathie). Le même avocat ajoute que s’il sait qu’il y a du TATP dans les toilettes, il n’y jette pas du Destop pour les déboucher. Il est répondu que l’acide sulfurique se mélange dans l’eau : c’est un produit homogène car il y a de l’eau dans l’acide sulfurique
  • Le TATP sent de manière vive en raison du procédé de fabrication ; les intervenants ont senti eux-mêmes une odeur

La semaine à venir

La semaine à venir sera consacrée à la suite des questions aux témoins, enquêteurs et juges d'instruction. Il n'y aura pas d'audience du 20 au 26 février, et les questions reprendront donc encore à partir du 27 février.

Soutien et défense

V-Europe fournit un soutien à toute victime de terrorisme qui le demande. Au moins un de nos coordinateurs est présent chaque jour au procès, et porte une veste blanche distinctive avec le logo de V-Europe dans le dos. N’hésitez pas à leur faire remarquer votre présence si vous le souhaitez. Plus d’informations sur nos coordinateurs sur le site web de V-Europe, en appelant ce numéro : +32 10 86 79 98 ou par mail : info@v-europe.org.

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Seventh week of the trial (copie)
Nieuwsbrief (week van de 12/12/2022)